La mode connectée : objets de mode ?

Une industrie connectée

L’industrie de la mode n’échappe pas à l’ère des objets connectés. C’est même un terrain de jeu considérable pour expérimenter le potentiel commercial des innovations autour de l’IOT, reliées à nos modes de vie. Les objets connectés dans la mode prennent des formes variées et via différentes connexions. De l’accessoire de mode aux nouveaux usages, des gadgets à la matière évolutive, de la collecte de données à l’ultra-personnalisation, les déclinaisons technologiques sont multiples. Les perspectives de valeur créative se dessinent de plus en plus et, le plus souvent en partenariat. La Data_Dress de Google & H&M, en est un exemple récent. De l’innovation à la commercialisation, ce vêtement va-t-il révolutionner la standardisation de la mode et des données ?

Pour bien comprendre les déclinaisons de la mode connectée, distinguons dans un premier temps les usages et les créations.

Accessoires ou des vêtements connectés ?

Daniel Ichbiah, écrivain et journaliste, interrogé par la revue INfluencia, distingue les accessoires connectés des vêtements connectés. « Les accessoires comme l’Apple Watch ou les Google Glass sont une façon de déporter les informations que l’on a déjà sur un iPhone ou PC sur un objet facile à porter sur soi. (…) Pour les vêtements c’est complètement différent. Il s’agit d’intelligence dans la matière que l’on porte sur soi et c’est une révolution, notamment pour les designers qui vont pouvoir créer des matières évolutives. »

Plusieurs exemples possibles à cela:

  • Diamodo, bijoux connectés WaveWorks Inc en Bluetooth, fabriqués par d’authentiques artisans, ingénieurs et artistes passionnés. L’application compagnon pour smartphone permet d’enregistrer de nombreux contacts. Le bijou connecté s’illumine et clignote en fonction des contacts et notifications de diverses applications comme WhatsApp ou les emails. La ligne de bijoux Diamodo est constituée de bagues, de bracelets et de colliers. Leur technologie d’illumination LED repose sur des pierres précieuses de différents types et couleurs du monde entier.

 

  • Le foulard connecté anti-pollution, développé par la start-up française Wair qui permet, à la fois de se protéger des polluants présents dans l’air en filtrant toutes les particules d’une taille supérieure à 0,1 micromètre, mais aussi, grâce à une application, de connaître le taux de pollution et de trouver le parcours le moins pollué. Un capteur change de couleur pour indiquer un taux de pollution élevé et de porter alors le foulard sur le nez.

 

  • La coiffe intelligente réalisée par la créatrice anglaise Lauren Bowker fondatrice de la marque THE UNSEEN, composée de bandes de cuir et de 4 000 cristaux Swarovski qui lisent l’activité cérébrale et changent de couleurs en fonction des pensées et réflexions de celui qui la porte.

 

 

  • La robe intelligente Butterfly du duo de créatrices Ezra et Tuba, équipée de la technologie Intel Edison. La robe est ornée d’une quarantaine de papillons bleus dont certains peuvent s’envoler simultanément si quelqu’un s’approche trop près de la robe, comme effrayés par cette présence.

 

Les designers ne sont pas les seuls à investiguer ce nouveau champ de création. Les marques l’ont compris, elles y voient l’opportunité de répondre aux attentes de plus en plus exigeantes en matière d’expérience client, de concevoir des produits ultra-personnalisés et d’optimiser l’intelligence des données.

Le vêtement connecté devient alors un « champ d’exploration extraordinaire pour les designers ».

Vêtements connectés, la data à fleur de peau

Google et H&M, via sa ligne Ivyrevel disponible uniquement sur Internet, se sont associés pour développer l’application mobile Coded Couture qui analyse les données de chaque utilisatrice pour lui créer une robe sur-mesure.

Le principe de cette « data dress » repose sur l’interface de programmation applicative (API) Awareness de Google. L’application Coded Couture analyse alors avec le smartphone toutes les données du quotidien : déplacements géolocalisés, boutiques, transports, restaurants, la météo de la ville de résidence, les activités sportives… pour proposer au bout d’une semaine une robe idéale à 99 dollars, en laine ou coton par exemple selon la température du pays, formelle ou plus casual selon l’activité professionnelle. D’après Aleksandar Subosic, co- fondateur d’Ivyrevel, dans un communiqué, « le projet Data_Dress doit permettre à chaque femme à travers le monde de se commander une robe qui reflète totalement son mode vie ».

Capture d’écran du site Ivyrevel : http://www.ivyrevel.com/fr/codedcouture/codedCouture.html

Pour l’instant, il existe une version beta de l’application testée par des influenceuses du monde de la mode, comme la bloggeuse suédoise Kenza Zouiten mise en avant dans la campagne de publicité du projet. Les autres fashionistas peuvent, elles, déjà s’enregistrer sur les sites de Ivyrevel et de Coded Couture pour tenter de gagner leur robe avant-gardiste.

Une façon pour H&M et Google de commencer à constituer une première base de données. Quant à l’utilisation à venir de l’application prévue cette année, elle permettra aux géants du prêt-à-porter et de la data, de recueillir l’intégralité des données personnelles des utilisatrices. Cette robe 100% personnalisée en vaut-elle le prix ? S’agit-il d’un effet de mode de la gadgétisation ou d’un réel usage créatif de la data ?

En septembre 2016, Google a déjà lancé avec Zalando l’expérimentation « Project Muze », une solution d’intelligence artificielle permettant de créer son propre style selon sa personnalité. Cet outil de Zalando sur tablette se base sur trois critères personnels la musique, les couleurs et les formes pour élaborer le style adapté aux préférences et à la personnalité de chaque utilisateur.

Le potentiel de ces innovations est à mettre en perspective avec la démocratisation de l’impression des vêtements 3D et surtout la demande croissante de pièces personnalisées accessibles. Selon les sociologues et les créateurs, c’est une conséquence prévisible de l’hégémonie d’enseignes aux créations standardisées.

Modes de connexion

N’oublions pas alors que la mode est surtout une industrie d’émotions, fondée sur des contradictions : des préférences et des valeurs personnelles conjuguées avec des tendances sociétales, une standardisation associée à une recherche constante d’authenticité.

Le succès à estimer avec la commercialisation de ces innovations permettra peut-être de déterminer dans quelle mesure les consommateurs de mode sont véritablement adeptes d’ultra-personnalisation via la technologie et d’une expérience en ligne jusqu’à même la peau.

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