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Les nouvelles technologies vues par les consultants Wavestone

Bienvenue en e-Estonie !

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L’Estonie a obtenu son indépendance en 1991, après plus de 45 longues années d’occupation soviétique. Au sein de la division du travail de l’URSS, elle était spécialisée dans les nouvelles technologies.

Le plus petit des pays baltes, avec 1,3 million d’habitants, a décidé de mettre à profit ces années de labeur en misant tout sur le numérique. C’est Toomas Hendrik Ilves, président de l’Estonie depuis son indépendance, qui fut à l’origine de ce pari. Pari qui s’avéra payant, comme l’attestent les intégrations successives de l’Estonie à l’Union Européenne ainsi qu’à l’OTAN en 2004, et son entrée dans la zone Euro en 2011.

L’Estonie est aujourd’hui une référence mondiale dans le domaine de la digitalisation et de la sécurité informatique, avec des entreprises vitrines telles que Skype ou KaZaA.

La fin des lourdeurs administratives

Le tout premier service numérique développé est la collecte des impôts en ligne (e-Tax), qui fut introduite en 2000. L’engouement de la population pour cette innovation permit d’atteindre des records en matière d’impôts collectés. En 2012, 94% des particuliers et 98% des entreprises ont déclaré leurs impôts en ligne.

Cette réussite conforta le gouvernement dans la direction prise et sa volonté de créer un État numérique, surnommé l’e-Estonie. S’en suivit la mise en place d’un nombre important de services en ligne destinés aux particuliers, à l’administration ainsi qu’au secteur privé. Les principaux sont les suivants :

  • L’e-Administration (2000) : la refonte du système administratif passe avant tout par celle de son mode de fonctionnement interne. De nombreux outils de travail collaboratif ont été mis en place pour optimiser au maximum les prises de décision au sein du gouvernement.
  • La Carte d’Identité Électronique (2002) : la carte d’identité Estonienne a été entièrement remplacée par une carte d’identité électronique, qui permet aux citoyens un accès unique et sécurisé à l’ensemble des services en ligne existants. Elle a été complétée par un système d’Identification Mobile, qui permet la même identification sécurisée mais via un téléphone portable, sans avoir besoin de passer par un lecteur de carte.
  • La signature électronique (2002) : ce service a permis de remplacer entièrement la signature manuscrite pour l’ensemble des démarches administratives d’ordres publiques ou privées, permettant aux Estoniens de signer leurs documents totalement en ligne.
  • L’e-Élection (2005) : l’Estonie fut la première nation à s’essayer au vote en ligne en 2005. Le système repose sur une identification unique et sécurisée via la Carte d’Identité Électronique. À l’envoi du vote, celui-ci est rendu anonyme. Ce système permet aux votants de pré-enregistrer leur vote et de le modifier autant de fois qu’ils le souhaitent avant l’élection.
  • Le Carnet de santé électronique (2008) et les e-Ordonnances (2010) : une des plus importantes révolutions fut la mise en place d’un système de centralisation des données médicales. Celui-ci permet un suivi complet du patient par ses médecins qui peuvent accéder à tout son dossier grâce à sa Carte d’Identité Électronique. Les ordonnances en ligne sont venues compléter ce système. 8 millions d’ordonnances électroniques sont ainsi éditées chaque année, soit 95% d’entre elles. Le patient peut à tout moment accéder  à son dossier médical et ses ordonnances, mais aussi vérifier qui y a eu accès.

Le rôle des banques dans ce développement

Les banques ont joué un rôle central dans la mise en place et le développement de l’ensemble de ces offres de services dématérialisés.

Elles ont fortement encouragé leurs clients à utiliser leurs Cartes d’Identités Électroniques pour sécuriser leurs transactions. Elles se sont également associées à de grands acteurs des Télécoms pour développer des formations gratuites de 2 jours (Look@World), et apprendre à tout adulte à se servir d’un ordinateur. Au total, plus de 10% des Estoniens adultes ont assisté à ces cours.

Ces efforts ont amené à un incroyable taux de 99,8% de transactions bancaires effectuées en ligne en Estonie. En plus de ses très nombreux avantages pour les banques en termes de coûts, cette digitalisation a permis d’apporter plus de transparence à l’ensemble de l’économie Estonienne, en reliant l’ensemble des transactions au système d’e-Tax.

Une fierté nationale

La Carte d’Identité Électronique est utilisée par plus de 90% des Estoniens. Elle regroupe les fonctionnalités de nombreuses cartes que nous avons l’habitude d’utiliser en France : carte vitale, permis de conduire, carte électorale, carte bleue, carte de transport, etc…

Schéma X-RoaxFier de cette numérisation, l’Estonie a décidé de mettre son savoir à disposition des autres pays et de partager avec eux son expérience pour leur permettre de suivre la même voie. Une exposition interactive a été créée dans cet unique but : le Showroom e-Estonia, et l’Estonie envisagerait même d’exporter gratuitement son système de gestion prénommé X-Road.

Mais le gouvernement Estonien ne s’arrête pas là ! Il est en effet possible à tout un chacun, Estonien ou non, de devenir e-Résident moyennant un coût dérisoire de 50 euros. Ce nouveau statut ne donne pas de droit d’entrée physique dans le pays, mais permet d’accéder à l’ensemble des services de l’e-Estonie, grâce à l’une de ces fameuses Carte d’Identité Électronique.

Les apports de cette digitalisation et ses possibles déviances

Ces différentes réformes ont fait de l’Estonie le pays le plus dématérialisé de la planète. Elles lui ont permis d’effectuer de nombreuses coupes budgétaires, vitales suite à la crise de 2008, et d’intégrer la zone Euro en 2011.


Il est tout de même légitime de s’interroger sur les risques liés à une digitalisation aussi poussée, en particulier au niveau de la sécurité des données et au respect de la vie privée. Car ce système d’identification unique, de suivi des transactions bancaires et des données médicales, semble parfaitement adapté pour tout apprenti Big Brother…

À cela s’ajoute les risques induits par les conséquences d’une attaque de hackers, qui pourraient essayer de s’emparer de ces données ou rendre inutilisable certains services. Une telle cyberattaque avait eu lieu en 2007, et avait entièrement paralysé le pays pendant plusieurs semaines. Les hackers avaient réussi à bloquer l’accès aux différents sites de l’administration Estonienne ainsi qu’à ceux des banques et journaux du pays.

Suite à cette attaque, l’Estonie a été à l’origine de la création du centre d’excellence pour la cyberdéfense (CCD COE) avec plusieurs autres pays membres de l’OTAN, qui est installé à Tallin et a été homologué en 2008. Les autorités Estoniennes assurent ainsi que le système est désormais on ne peut plus sécurisé.

 

Alors, prêts à devenir e-Estonien ?

4 thoughts on “Bienvenue en e-Estonie !

  1. Bel article !
    Ce qui m’impressionne encore plus, c’est que visiblement, le gouvernement estonien a aussi réussi le tour de force d’inclure même ses populations seniors, traditionnellement cantonnées au papier pour tout ce qui concerne l’administratif, à l’ère du numérique.

    Je pense quand même qu’avec une population 60 fois inférieure à la nôtre, la conduite du changement est un peu plus facile 😉

  2. Bonjour,
    Article très intéressant, le pays peut constituer un modèle pour ceux qui sont connus pour la lourdeur administrative et peut simplifier quelques démarches. Cependant je reste contre une numérisation aussi poussée compte tenu des risques que cela peut représenter.
    Merci pour cet article et bonne continuation.

  3. Bonjour,

    Depuis peu la société de type OÜ (équivalent de la SARL française) ne requiert plus obligatoirement un capital minimum de 2500 €. Ceci permet donc de créer une entreprise à moindre frais ou la responsabilité personnelle est très limitée.
    Le statut d’E-Résident permet de gérer son entreprise à distance, quelque soit la localisatio dans le monde.
    Associé à une fiscalité particulièrement avantageuse, il est aisé de comprendre quel attrait peut exercer ce pays, très sympathique de plus.

    Bien cordialement,
    Laurent

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