Boutiques physiques : commerçants et e-commerçants sont condamnés à innover

Avec Surcouf, Virgin ou plus récemment Pixmania, la liste des enseignes ayant annoncé la fermeture de leur réseau de boutiques physiques s’allonge encore. Dans un marché ultra concurrentiel, les commerçants, traditionnels ou pure-players présents dans le monde physique, sont condamnés à innover pour se différencier et survivre à la guerre des prix menée par les grands pure-players, Amazon en tête.

Pour les pure-players, se lancer dans les boutiques physiques est un pari risqué

Pour les pure-players souhaitant lancer un réseau de boutiques, dupliquer le concept des enseignes physiques ou décliner simplement son site internet en magasin n’est plus suffisant : il faut innover, créer un lien fort entre la marque sur Internet et sa présence dans l’univers physique. Ce pari est loin d’être gagné.

L’exemple de Pixmania montre que l’e-retailer n’a jamais vraiment réussi sa mutation. Les acteurs du e-commerce qui ont réussi à maintenir et développer leur réseau physique, comme Cdiscount ou Grosbill par exemple, l’ont fait principalement grâce à l’appui de leur maison mère, Casino et Auchan respectivement. Ils ont tous deux profité du large réseau de distribution, de la notoriété et des moyens financiers des deux géants de la distribution.

Pour les pure-players, l’enjeu est donc d’innover dans l’expérience d’achat qu’ils offrent à leurs clients, et cela à tous les niveaux :

  • il faut innover dans les parcours d’achat, en créant une forte complémentarité entre le site web et la boutique, en mettant à disposition des moyens de paiement innovants – comme des terminaux de paiement mobiles ou du NFC – en lieu et place des caisses traditionnelles, ou encore en proposant des offres spéciales sur mobile pour attirer les clients en boutiques.
  • il faut innover dans la présentation des boutiques, en permettant aux clients de tester les produits les plus vendus sur le site, en leur mettant à disposition des bornes tactiles de démonstration et en réussissant à créer un véritable univers, plus chaleureux que ne l’est le simple point de retrait.
  • enfin, il faut innover dans les services offerts en boutique, avec des vendeurs conseils qui sauront conseiller et vendre des produits additionnels aux clients venus chercher leur colis, ou encore des programmes de fidélisation novateurs pour conserver des clients devenus très volatiles.

Jeff Bezos, le patron d’Amazon, résumait très bien ces enjeux pour les pure-players il y a quelques mois sur CBS : « Si 100 entreprises sont déjà présentes sur un marché et si vous êtes la 101ème entreprise à arriver sur ce marché, vous n’apportez rien à la société. Quant aux ventes, elles ne seraient de toute façon pas très bonnes. Nous voulons donc proposer quelque chose d’unique. Nous n’avons pas encore trouvé la bonne idée mais si nous la trouvons, nous ouvrirons des boutiques. »

Pour les commerçants traditionnels, l’innovation est la seule réponse à la concurrence des e-retailers

La présence physique des retailers traditionnels leur confère un avantage non négligeable vis-à-vis de leurs concurrents en ligne : ils bénéficient généralement d’une grande notoriété et sont reconnus pour la qualité du service qu’ils offrent en boutique. Pourtant, la mutation de secteurs comme celui des produits technologiques ou culturels et l’insolente prospérité des grands e-retailers, comme Amazon, a déjà relégué certains commerçants traditionnels aux oubliettes. Englués dans des modèles économiques vieillissants, ils n’ont pas su prendre le virage de l’innovation à temps.

C’est le cas de Virgin. Dans un marché de la vente de biens culturels très concurrentiel et bouleversé en profondeur par l’arrivée des grands acteurs du web, le groupe a continué à s’accrocher à son offre de CD / DVD / livres, tout en continuant à louer très cher ses locaux de centre-ville.

L’enjeu dans ces secteurs d’activités est donc d’innover;  innover dans les business model, dans l’offre, dans les prix et faire évoluer profondément l’expérience d’achat offerte aux clients.

Les nouvelles tendances dans l’industrie du retail

Certains acteurs ont déjà anticipé ces grands changements et entrepris de construire une grande complémentarité entre leur magasins et leur sites web.

Aux États-Unis par-exemple, on assiste à une forte croissance du « ship from store » : le magasin se transforme en expéditeur de commandes lorsque le produit n’est plus disponible dans les entrepôts web ou dans un autre magasin. Cela permet notamment de lutter contre le phénomène du showrooming, consistant à aller chercher des informations sur un produit en boutique et à utiliser son mobile pour trouver l’e-commerçant ayant le produit en stock et au meilleur prix. Le vendeur d’un magasin n’ayant plus le produit en stock peut utiliser deux leviers pour convaincre son client : il peut aligner son prix sur celui de la concurrence et déclencher l’envoi immédiat du produit depuis une autre boutique à proximité.

De plus en plus de grandes enseignes en France développent le « click and collect » : le client passe commande ou réserve le produit sur le site internet, puis vient chercher son produit en boutique quelques heures plus tard et le paie s’il ne l’a pas déjà fait en ligne. C’est un vrai levier pour attirer le client en boutique et lui vendre des produits additionnels, comme des accessoires informatiques lors de l’achat d’un PC. La mise en place de ce système d’achat nécessite souvent de revoir complètement l’organisation et les métiers des distributeurs, les centres de profits n’étant plus séparés entre les magasins et le web.

Enfin, l’innovation doit aussi avoir lieu sur les prix. Darty, par-exemple, propose sur son site internet des produits exclusifs à des prix planchers, tout en vendant en boutique des produits similaires à des prix légèrement supérieurs, en justifiant la différence par le service offert au client.

7 thoughts on “Boutiques physiques : commerçants et e-commerçants sont condamnés à innover

  1. 2 articles pour continuer la réflexion :
    – 5$ « juste pour regarder », le moyen de lutter contre le showrooming !
    http://consumerist.com/2013/03/25/store-combats-showrooming-with-5-just-looking-fee/
    – WalMart qui va mettre des lockers dans ses magasins pour stocker les biens commandés en ligne, en attendant que l’acheteur vienne les chercher
    http://www.reuters.com/article/2013/03/26/net-us-walmart-ecommerce-lockers-idUSBRE92P0WT20130326

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