Où en est la transformation digitale des entreprises du secteur de l’énergie ?

La transformation digitale connait actuellement des résultats en demi-teinte… Seulement 53% des salariés affirment en 2018 que leur entreprise s’est engagée dans une transformation digitale. Cette dernière est perçue, pour 56% des sociétés, comme une opportunité mais pas forcément une nécessité. Cependant, beaucoup d’entreprises ayant réussi leur transformation digitale ont conscience des avantages qu’elle peut avoir car une grande partie des avis recensés est positive. En effet, 40% de ces entreprises ont constaté une amélioration de leurs résultats et 44% estiment par ailleurs avoir optimisé leur performance opérationnelle. Une mobilisation des acteurs commence donc à se faire sentir, notamment chez les ETI qui souhaitent, à 91%, engager leur révolution digitale.

(Source : http://www.socialy.fr/blog/transformation-digitale-chiffres-infographie/)

La révolution numérique s’intègre aux enjeux de la Transition Energétique…

La transition énergétique est perçue comme un bouleversement pour de nombreuses entreprises positionnées sur le marché Energy&Utilities. En effet, en plus de modifier les business models, cette transition oblige les entreprises à faire évoluer leurs métiers et leurs pratiques. Chaque acteur du marché doit ainsi œuvrer pour optimiser ses processus et sa performance opérationnelle.

D’autre part, les nouvelles mobilisations des pouvoirs politiques au profit de la transition énergétique ont imposé aux acteurs historiques de « verdir » leurs solutions énergétiques pour limiter l’impact sur l’environnement. L’ouverture à la concurrence sur certains marchés de l’Energie et l’émergence de nouveaux business autour de la transition énergétique ont conduit à la création de nouvelles bulles concurrentielles :  fourniture-distribution d’énergie, énergies renouvelables, nouvelles solutions disruptives (blockchain, etc.). Par conséquent, les différents acteurs de ces marchés mettent en œuvre des moyens importants pour se différencier de leurs concurrents. Le géant Total a par exemple lancé en 2018 son projet « Total spring » (électricité verte à bas prix) en réponse à la création de la filiale « EDF Energies nouvelles » ou bien aux nombreuses actions d’Engie (notamment l’acquisition de Solairedirect).

Pour se positionner sur ce marché concurrentiel, les entreprises se servent de la digitalisation pour accroître leur compétitivité et valoriser leur potentiel disruptif. C’est notamment le cas d’Engie qui a créé la structure « Engie Fab » dédiée au développement d’innovations ainsi que le fond de capital-risque « Engie New Ventures » pour investir dans les start-up(s). Ainsi, la hiérarchie imposée par les groupes historiques tend à se modifier avec l’arrivée de nouveaux acteurs positionnés sur le digital. La révolution numérique induit une adaptation structurelle et culturelle des entreprises afin de parfaire leur business model et d’évoluer vers un modèle agile. Par ailleurs, la digitalisation oblige aussi les entreprises à être « customer-centric » en personnalisant les services digitaux pour faire face à l’exigence croissante des consommateurs. Les chiffres ci-dessous (source : https://www.accenture.com/fr-fr/insight-new-energy-consumer-thriving-new-retail-ecosystem) témoignent de cette exigence et de la volonté des utilisateurs finaux de bénéficier de services au plus proche de leurs activités quotidiennes.

Dans le développement de nouvelles applications digitales, l’évolution du web est devenue un des facteurs clés. En effet, parti d’un web traditionnel (Web 1.0) centré sur la communication de données, les Web 2.0 et 3.0 fondés sur le partage et l’utilisation massive d’informations ont rapidement conquis le marché. Désormais, les applications digitales font référence au Web 4.0, dit « Web intelligent », permettant une personnalisation ouverte du contenu et offrant un large panel d’expérimentations disruptives. Cependant, ce Web 4.0 suscite fréquemment des inquiétudes quant au périmètre d’utilisation des données et au rapport à la vie privée.

Quelles sont les technologies phares de la digitalisation du secteur de l’Energie ?

La modernisation des outils industriels : c’est aujourd’hui un des plus grands défis des énergéticiens pour optimiser leur performance opérationnelle. Pour faire face à celui-ci, les entreprises s’appuient sur l’émergence de nouvelles technologies, souvent disruptives, pour améliorer leurs processus.

Les objets connectés (IoT) ont depuis quelques années bousculé les pratiques mises en place dans la maîtrise et la réduction des consommations d’énergie. En effet, les consommateurs bénéficient désormais de nombreux outils digitaux (interrupteurs intelligents, ampoules connectées, stations météo, etc.) leur permettant de contrôler leur dépense d’énergie et ainsi de limiter l’impact environnemental.

L’Intelligence Artificielle (IA) est également un domaine technologique en pleine croissance sur le secteur des énergies. Les données récoltées sur les consommateurs permettent aujourd’hui d’alimenter des IA capables de parfaire le parcours client. A l’image des chatbot(s), l’expérience client est au premier plan, avec toujours pour cible de satisfaire ses exigences tout en contribuant à la réduction de la consommation d’énergie. L’IA est également un atout majeur pour la mise en place de processus de maintenance prédictive sur les équipements.

Les « smart grids » (réseaux intelligents) sont devenus un des moteurs de la transition énergétique. En effet, les réseaux d’électricité doivent aujourd’hui s’adapter aux enjeux de maîtrise et de couverture de la consommation énergétique. Les smart grids, à l’image de systèmes informatiques intelligents, assurent l’ajustement des flux d’électricité entre consommateurs et fournisseurs. Ils permettent donc de maintenir l’équilibre entre production, distribution et consommation.

La Blockchain est devenue l’alternative pour accélérer les transactions (achat, vente, signature de contrats) tout en réduisant leurs coûts. Son concept pour le secteur de l’Energie est simple : vendre de l’énergie à d’autres consommateurs en s’affranchissant des intermédiaires comme les distributeurs. La France souhaite se positionner sur ce nouveau type d’opportunités, notamment en expérimentant l’utilisation de la Sunchain (blockchain destinée aux acteurs de l’énergie verte). Cette technologie est souvent critiquée car elle présente un frein notable qui est sa consommation énergétique très importante (300 KWh d’électricité pour une transaction, soit pour le réseau Bitcoin une consommation annuelle en électricité supérieure à celle de l’Irlande). Source : https://www.capital.fr/entreprises-marches/le-bitcoin-consomme-plus-delectricite-que-lirlande-et-158-autres-pays-1257985

 

En guise de vitrine, plusieurs projets d’envergure ont été menés par les énergéticiens français pour faciliter le contrôle et la gestion des consommations d’énergie au sein des foyers. L’application Sowee, développée par EDF pour le pilotage d’équipements au sein des ménages (chauffage, ampoules, etc.), est un exemple probant de mise en avant de l’IA. En effet, sa seconde version prend le rôle d’un réel assistant domestique. A l’aide d’un module de reconnaissance vocale, le lien entre l’utilisateur et la station connectée est désormais établi. En déployant ce type d’application, EDF annonce « prendre le virage du numérique et être un partenaire du bien être durable dans l’habitat ».

Les compteurs Linky, déployés par Enedis, mettent également en avant une technologie qui place l’Humain au cœur des attentions. Ils permettent aujourd’hui aux consommateurs de suivre en temps réel leurs dépenses énergétiques et d’ajuster si nécessaire leur consommation. Ces compteurs sont d’ailleurs soutenus par l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) car ils « présentent de réels bénéfices pour le consommateur, la collectivité et la transition énergétique ». D’autre part, les consommateurs ont également la possibilité d’avoir plus de détails sur leurs factures qu’auparavant, ce qui pousse à établir une relation de confiance avec leurs fournisseurs d’énergie.

Quels facteurs clés de succès ?

La digitalisation du secteur de l’Energie impose aux entreprises d’être en capacité d’intégrer des écosystèmes innovants (start-up, etc.) dans leurs projets de R&D. Par conséquent, l’Open Innovation tient une place importante pour faciliter la structuration des projets de digitalisation. A titre d’exemple, EDF a pris part en 2018 au capital de la société McPhy pour développer de nouvelles solutions autour de filière Hydrogène (aujourd’hui, EDF en est l’actionnaire principal).

Avec l’intervention croissante des régulateurs sur le marché des énergies, les entreprises voient leurs rôles évoluer au gré des directives sur la protection de l’environnement. Pour de nombreuses entreprises qui ont lancées des projets de R&D, il est parfois difficile de ne pas sortir du périmètre communiqué par les autorités régulatrices.

Enfin, comme pour tout projet technologique, la cybersécurité est un élément indispensable à traiter afin d’assurer la confiance des utilisateurs finaux. En effet, la majorité des applications de partage de données entre les consommateurs et leurs opérateurs sont susceptibles d’ouvrir des failles informatiques. Les entreprises, en collaboration avec les écosystèmes innovants, se doivent donc de prendre un compte les directives des autorités publiques à ce sujet et d’assurer la sécurité des transferts de données.

Bien entendu, afin de satisfaire les exigences des consommateurs, il est nécessaire pour les grands groupes de s’appuyer sur des projets pilotes fondés sur des investissements long terme. Ce type de projets permet de tester et d’optimiser au fil du temps les applications qui sont en cours de développement.

Où en est la transformation des énergéticiens ?

Les chiffres ci-dessus (source : https://www.pwc.fr/fr/publications/energie-utilities-et-mine/energie/5ans-pour-la-transformation-des-energeticiens.html) témoignent de la difficulté des entreprises du secteur de l’Energie a instauré de nouveaux business autour de la digitalisation. Pour un grand nombre d’entre eux, il est déjà compliqué de tirer profit des actifs existants. La sphère concurrentielle qui s’est créée contraint les entreprises à être réactives. Cependant, certaines se lancent avec précipitation pour ne pas être dépassées par un concurrent, avec pour conséquence l’échec de leur projet. C’est pour cela que seulement 5% des entreprises pensent changer de stratégie à court terme et que 40% y songent mais à l’horizon 3 ans. Inquiets par la concurrence accrue, les dirigeants doivent également faire face à l’exigence croissante des consommateurs, qui peut parfois être synonyme d’une perte de réputation notoire pour une entreprise.

Avec un secteur en forte mutation et de nouveaux acteurs (gaz et pétroliers) à la recherche de parts de marché, il est désormais nécessaire pour les entreprises d’assurer leur révolution numérique. Par conséquent, compte tenu de ces éléments, le marché de l’Energie demeure être un marché en devenir, porté par l’Innovation et la transition énergétique :

« L’avenir énergétique est extrêmement prometteur, sous le double effet du développement de l’innovation et d’une prise de conscience des opinions publiques et économiques de la nécessité de passer d’un modèle centralisé à un modèle collaboratif. » Corine DUBRUEL, Présidente du groupement professionnel des Centraliens de l’énergie

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