Les entreprises face au mouvement Open Data

Aujourd’hui limité aux organismes publics, le mouvement Open Data pourrait très prochainement pénétrer la sphère privée et exiger des entreprises la libération progressive ou non de données, les entreprises de service public étant potentiellement celles qui seraient concernées en premier.

 

Anticiper le mouvement plutôt que de le subir

Conscientes de cette éventualité, les entreprises se doivent nécessairement de se préparer à une telle situation, et ont tout intérêt à rejoindre le mouvement progressivement, à « prendre la vague » plutôt que de se faire dépasser par les évènements. C’est d’autant plus vrai que le mouvement de fond à l’origine de la démocratisation de l’open data est tellement fort qu’il serait naïf de croire qu’il est possible d’échapper au phénomène.

Pour une entreprise, mieux vaut alors percevoir l’Open Data comme un niche d’opportunités d’évolution plutôt qu’une lourde menace pesant sur le modèle de données en vigueur aujourd’hui. Mais comment se préparer à une éventuelle mise à disposition du grand public de données jusque-là soigneusement gardées par l’entreprise ?

 

Développer une image d’entreprise « ouverte » et faire figure de référence sur l’Open Data

La première nécessité pour une entreprise sera de passer au crible l’ensemble des données qu’elle détient et d’en réaliser une cartographie en identifiant les données « publiables », les données sensibles, les données convoitées par les concurrents, etc.

Il s’agira dans le même temps de libérer des données potentiellement non réutilisables à des fins commerciales, dans un simple soucis de développer une image d’entreprise « ouverte » et de faire figure de « bon élève » auprès des institutions de l’Open Data.

 

Ausgrid par exemple, fournisseur d’énergie australien de l’État de Nouvelles-Galles du Sud (1,6 million de foyers alimentés), a rendu publique des données macroscopiques comme la consommation d’électricité quotidienne moyenne par foyer (sur 3 mois), ou la consommation totale de l’ensemble du réseau. L’entreprise, placée sous le contrôle du gouvernement de l’État, met également en avant certaines de ses activités en libérant des données telles que le nombre de lampadaires réparés et le temps moyen de réparation, le nombre de graffitis nettoyés et le temps moyen de nettoyage, ou encore le nombre d’installations de panneaux solaires ainsi que leur contribution à la production d’électricité pour le réseau. Enfin, le fournisseur ne s’est pas limité à la mise à disposition sur son site de jeux de données brutes mais propose également de visualiser sur une carte (de Google Maps) l’ensemble des données sus-citées.

 

 

L’intérêt, au-delà d’avoir une longueur d’avance sur les obligations en termes de libération de données, sera de pénétrer dans les cercles d’influence autour de l’Open Data. Rappelons en effet que la notion de donnée en open data n’a pas encore de définition juridique reconnue, et que les autorités en charge de fédérer la mise à disposition de données (comme Etalab) seront sans doute dans une démarche de co-définition avec les producteurs de données de la « cible » à libérer.

 

Identifier des partenaires potentiels et s’approprier les services créés à partir des données libérées

Dans l’hypothèse où les obligations ne sont pas extrêmes et où l’entreprise garde une marge de manœuvre raisonnable sur la nature et la qualité des données libérées, l’enjeu politique de développement d’image d’entreprise « ouverte » et en avance de phase sur le terrain de l’Open Data pourra se transformer en un enjeu économique.

Ainsi, toute entreprise de service public dispose de données potentiellement réutilisables et qui, éventuellement croisées avec d’autres jeux de données, peuvent sans doute mener à des services innovants, profitables aux citoyens et aux consommateurs finaux. Le risque pour une entreprise est alors que les données libérées suffisent à des développeurs particuliers ou à des start-ups pour créer de tels services en propre, c’est-à-dire sans avoir besoin en quoi que ce soit de traiter directement avec l’entreprise. L’enjeu sera alors de ne libérer qu’une partie contrôlée de données, pour susciter l’attention d’acteurs dont le cœur de métier est de développer des services, puis de se rapprocher de ces acteurs. Cela pourra prendre la forme de partenariats, et mener à la création et à la mise sur le marché de services innovants, cette fois sous l’étiquette ou co-étiquette de l’entreprise productrice des données.

 

En somme, l’adoption rapide et progressive d’une politique Open Data permettra de répondre en premier lieu à des enjeux de notoriété, mais pourra aussi servir de levier pour établir de nouveaux partenariats avec des acteurs réactifs, indispensables à la compétitivité de l’entreprise dans un nouveau domaine inévitablement concurrentiel : celui des services. Les entreprises doivent donc prendre impérativement et rapidement conscience des enjeux et faire de l’Open Data une composante de leur réflexion stratégique autour de leur modèle de données.

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